En voyant les Marbres d'Elgin
John Keats
Mon esprit est trop faible -- l'idée de la mort
Pèse lourdement sur moi comme un sommeil qu'on refuse,
Et chaque pinacle, chaque sommet de divin héroïsme
Issu de mon imagination, me dit que je devrai mourir
Comme un Aigle malade qui regarde le ciel.
Pourtant, c'est un doux luxe que de pouvoir me dire
En pleurant, que je n'ai pas a garder les vents ennuagés
Frais pour que s'ouvre l'oeil de l'Aurore.
Telles splendeurs confusément conçues par l'esprit
Portent au coeur un indescriptible tumulte;
De même ces merveilles lui portent une vertigineuse douleur,
Qui mêle la grandeur de la Grèce avec les grossiers
outrages
Du Temps ancien -- avec un courant tumultueux --
Un soleil -- l'ombre d'une Grandeur.

Poème de Roger Casement
Rendez les Marbres d'Elgin, qu'ils reposent,
Sans tache, purs sous le ciel attique
Les doigts fumants de notre climat du nord
Font plus de ruine que tous le temps ancien.
Combien de fois le grondement de la mer Piréenne
Rôdant par la salle à colonnes et le temple sombre
A frappé ces oreilles de marbre, qui maintenant doivent fuir
Le bourdonnement tourbillonnant de Londres, vacillant vers midi.
Ah ! qu'ils entendent encore le bruit qui flotte
Autour du sanctuaire d'Athènes dans la brise du matin -
Le beuf mugissant, la clarine de la chèvre qui grimpe
Et l'abeille assoupie dans la brise du lointain Hymette.
Rendez les Marbres; qu'ils montent la garde
Là où vit encor l'Art, endormi sur la tombe de Phidias.
Roger Casement est un révolutionnaire irlandais
qui fut pendu par les Anglais pendant la première guerre mondiale.
Extrait d'un discours
prononcé par Alexander Rangavis
à la réunion de la Société Grecque d'Archéologie
Le 12 mai 1842, devant le fronton est du Parthénon.
"Que dirait l'Europe, j'en frémis,
si quelqu'un trouvait un dessin de Raphaël ou d'Apelle
et, incapable de l'emporter en entier,
coupait les jambes ou la tête de cette oeuvre d'art .
Si l'Angleterre, amie d'exploits vaillants,
ne peut emporter ce temple entier sur son sol,
et avec lui le ciel d'un bleu profond
sous lequel se trouve ce monument tout blanc,
et ne peut emporter l'air transparent qui baigne le temple
et le soleil brillant qui le dore -
si l'Angleterre ne peut emporter tout cela dans le climat de son
nord lointain, alors, de même que jadis rois et roturiers
envoyaient des
offrandes d'adoration au Parthénon et à l'Acropole,
de même, l'Angleterre devrait nous renvoyer,
en signe de respect envers le berceau de la civilisation,
les joyaux du temple qui en furent arrachés
et sont maintenant lointains et sans valeur,
alors que le temple lui-même demeure tronqué et informe."
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